L'amour commence en hiver, Simon van Booy



Mon vieux professeur de géographie nous a un jour dit que la musique, les peintures, les sculptures et les livres du monde entier étaient des miroirs dans lesquels nous pouvions distinguer des variantes de nous-mêmes. [p. 17]

Tandis qu’il garde toujours avec lui la moufle d’une enfant décédée et joue sur les plus grandes scènes musicales mondiales pour ce fantôme, elle récolte des glands en souvenir d’une journée d’hiver où le corps de son petit frère a été retrouvé dans la neige au pied d’un arbre. Ces deux êtres esseulés, marqués par la mort d’un être cher pendant leur enfance, se rencontreront et sauront se reconnaître au-delà des mots. Ils réapprendront à vivre pour eux-mêmes et à atténuer la présence des fantômes de leur vie.

Ce court récit d’une rencontre amoureuse, tant narré par d’autres auparavant et à l’avenir, l’est avec beaucoup de douceur et de poésie par Simon Van Booy, qui joue habilement des non-dits et de la communication non verbale. À l’inverse de ses personnages peu loquaces, sa plume est plus bavarde et se laisse souvent aller à quelques aphorismes sur la musique, l’art ou les sentiments. De ma lecture, j’ai l’impression de ne pas garder grand-chose, pas même le charme qui me reste après les romans de Gaëlle Josse, auxquels j’ai pensé à plusieurs reprises en raison d’une sensibilité semblable dans le traitement du sujet. Ce roman nécessite selon moi que le lecteur accepte de se laisser porter par le récit et la voix poétique de l’auteur, sous peine de n’y voir qu’une histoire banale et des phrases souvent simplistes ; j’ai pour ma part souvent oscillé entre ces deux sensations et manqué une partie du charme de ce texte.

[Simon Van Booy, L’amour commence en hiver, trad. par Micha Venaille, Paris, éd. Autrement, 2012]

13 commentaires:

  1. Au titre, on croirait à de la littérature légère, des livres pour filles, on dirait que c'est plus profond que ça...

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    1. Un avis masculin pourrait être intéressant pour le vérifier : j'aurais tendance à destiner cet ouvrage aux femmes, mais il est en effet plus profond que la littérature à l'eau de rose. Il en reprend les thèmes, mais les traite avec plus de délicatesse et surtout moins de "guimauve", de légèreté.

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  2. Suite à ma remarque sur un billet précédent, je ne sais plus si j'ai envie de lire l'auteur (pour répondre à ta question, le prochain livre a paraître est 'The Illusion of Separateness', traduit par "Outre-Atlantique", toujours par la même personne contrairement à ce que je pensais et toujours publié chez Autrement). C'est son dernier en VO.
    Donc, je disais que je ne suis plus sûre de vouloir lire l'auteur car j'ai lu très récemment un article écrit par lui où il évoque sa vie personnelle et ses propos m'ont "gênée" (et je n'ai pas été la seule, à lire les commentaires très partagés). J'ai du mal à être d'accord avec sa vision de certaines choses, sans compter la photo sur le lit où il garde ses chaussures... Ça a l'air superficiel mais ça m'a rebutée (en plus du contenu de l'article).

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    1. Personnellement, je changerai peut-être d'avis plus tard, mais je n'ai pas vraiment envie de relire l'auteur maintenant. Le thème de son prochain livre traduit (merci pour l'info) ne me tente pas, donc ça facilite les choses. Est-ce que tu pourrais aussi me transmettre l'article stp ? (même en anglais, je me débrouillerai) Ce n'est pas forcément superficiel : c'est lui qui donne cette image de lui, que tu pourrais retrouver dans ses textes et ne pas apprécier pour la même raison.

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  3. http://m.guardiannews.com/lifeandstyle/2013/jul/20/new-stepmum-daughter-simon-van-booy

    Pas faux ;)

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    1. Merci ! J'ai lu les trois quarts de l'article et comprends ce que tu voulais dire... Je n'ai pas eu l'impression de le ressentir dans son livre, donc peut-être que ce serait à tenter, mais maintenant que tu le sais, ça ne peut que te rester et t'influencer malgré tout.

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    2. Tu as mis le doigt sur mon problème ! Et j'ai bonne mémoire (surtout quand je ne cherche pas à retenir quelque chose...) donc je m'imagine déjà ouvrir son bouquin et voir les semelles de ses chaussures ;) tout en pensant à l'article (super long - moi aussi, j'ai un peu zappé parfois :o)

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    3. Aucun rapport : je vois que tu lis Bowen et qu'il s'agit de nouvelles. Impatiente de connaître ton avis car hormis notre première rencontre avec un fin recueil de récits d'enfance ("Sept hivers à Dublin"), je n'ai plus réussi à accrocher (lu une nouvelle, un roman et abandonné un autre roman).

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    4. Rien que le chapeau de l'article m'a horripilée (cette façon de parler de soi à la 3e personne en se couvrant d'éloge, c'est d'une subtilité rare...), puis le reste m'a vite agacée (et choquée aussi)

      Pour Bowen, je ne sais pas encore te répondre, malgré les six nouvelles lues : je suis assez déstabilisée et pas sure d'aimer ça. J'ai l'impression que la qualité est là, mais que l'esprit très anglais de ces nouvelles me passe totalement au-dessus de la tête. J'essayerai de faire le tri dans mes impressions et d'écrire un article digne de ce nom.

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  4. Ça a l'air si particulier. Mais je pense que ça pourrait me plaire. Je suis curieuse avec les commentaires que je lis ici. En tout cas la première phrase qui commence ton billet me plaît bien.

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    1. En s'y laissant porter, c'est un beau texte, qui peut paraître très poétique et particulier (ou terriblement banal). Ton avis m'intéresserait si tu le lis.

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  5. Ah dommage, je m'étais laissé porter et j'avais été très touchée. Mais je comprends qu'on n'accroche pas, c'est une vision particulière de la vie et même du deuil.

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    1. C'est surtout le style qui m'a parfois fait décrocher, plutôt que cette vision particulière, en fait.

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