La lettre et la plume - « Je ne suis pas jolie, je suis pire »


La lettre et la plume

Présentation de l’éditeur : LA LETTRE ET LA PLUME, une collection qui marie littérature et histoire au travers d’écrits intimes (mémoires, correspondances, journaux, chroniques…) d’une grande qualité littéraire.

Ma découverte : j’ai découvert cette collection du Livre de poche dès ses débuts en septembre 2010 avec la première parution, « Je meurs d’amour pour toi… » qui reprend une partie de la correspondance d’Isabelle Bourbon-Parme et de sa belle-sœur l’archiduchesse Marie-Christine entre 1760 et 1763. Séduite, j’ai ensuite acheté tous les ouvrages suivants, au fur et à mesure de leur publication, sans avoir forcément le temps de les lire. J’ai décidé d’y remédier, au moins en partie, cette année, et ai enfin lu le second titre de la collection : « Je ne suis pas jolie, je suis pire. »


« Je ne suis pas jolie, je suis pire »
Présenté et édité par Georges Poisson

Présentation de l’éditeur :

La princesse Pauline de Metternich, femme de l’ambassadeur d’Autriche auprès de Napoléon III, sut faire oublier sa laideur (« un nez en trompette et des lèvres en rebord de pot de chambre ») grâce à son esprit acéré et ses extravagances.
Elle qui anima la cour impériale et la vie mondaine du Paris du second Empire, conte par le menu les fêtes, dîners et scandales et dresse dans ses souvenirs un portrait savoureux de ses contemporains.


Ma présentation de l’ouvrage :

Ce livre est divisé en trois parties :
  • Une introduction dans laquelle Georges Poisson présente la princesse Pauline de Metternich et la façon dont elle était perçue par ses contemporains, puis résume sa vie afin de contextualiser l’écriture de ces Mémoires et la période qui y est relatée ; 
  • Les souvenirs de Pauline de Metternich entre 1859 et 1871, c’est-à-dire pendant sa vie à la cour de Napoléon III en tant qu’ambassadrice, puis lors de la fin de l’Empire et de sa fuite en Angleterre ; 
  • Des notes sur les personnes citées par Pauline de Metternich dans son récit, ainsi qu’une bibliographie sur cette période historique.
 
Mon avis :

Connue de son temps pour ses fantaisies et son attitude parfois scandaleuse, la princesse de Metternich fut ambassadrice à la cour de Napoléon III de 1859 à 1870 : ce sont ces années – les plus belles de sa vie, affirme-t-elle – qu’elle relate dans la première partie du second cahier de ses Souvenirs, édité ici par Georges Poisson. Fidèle à l’image qu’elle donnait d’elle-même, elle n’aborde jamais le travail d’ambassadeur de son mari ou le moindre sujet politique et leur préfère le récit des dîners et soirées à la Cour ou quelques anecdotes sur le couple impérial et leurs invités. Cela donne à ses Mémoires l’aspect d’une chronique mondaine, qui aurait pu être plaisante, mais m’a personnellement déçue. En effet, malgré les notes très complètes de l’éditeur (placées en fin d’ouvrage, ce qui rend leur consultation peu commode), il est peu passionnant de lire pendant une bonne centaine de pages comment était habillée Madame Unetelle à tel dîner et quel impair vestimentaire a commis telle autre en présence de l’Impératrice, lorsqu’on ne connaît aucune de ces personnes. De plus, le ton piquant et impertinent annoncé dans le titre* et la présentation de cette princesse m’ont semblé bien absent de ses Souvenirs : sans doute est-ce en partie dû au changement d’époque. N’étant plus accoutumé à l’étiquette de Cour et à ses usages, certaines réparties choquantes au 19e siècle ne le sont plus aujourd’hui et passent tout à fait inaperçues. Néanmoins, malgré l’ennui qui dominait trop souvent ma lecture, j’ai été amusée par certaines anecdotes et ai beaucoup apprécié découvrir l’ambiance historique du Second Empire : la Cour de Napoléon III était brillante et pleine de fêtes, comme le fut celle des derniers rois de France notamment. Le couple impérial apparaît également comme très humain dans ce texte, puisque Pauline de Metternich en était assez proche et recueillait certaines confidences.

Dans la seconde partie de ces Souvenirs, beaucoup plus courte, l’ambiance change du tout au tout : c’est le début de la guerre avec la Prusse et la chute de l’Empire. L’ambassadrice fuit en Angleterre, ainsi qu’une autre dame de la Cour et, plus tard, l’Impératrice elle-même. Les évènements historiques, parce qu’ils la touchent directement, interviennent davantage dans le récit de la première : c’est la raison pour laquelle j’ai préféré cette partie des Mémoires, moins répétitive et « hors du temps ».

En conclusion, ces Souvenirs sont selon moi un témoignage intéressant pour qui s’intéresse à la Cour de Napoléon III et à l’ambiance festive qui y régnait, mais sont un peu fades pour qui y cherche le ton piquant de la citation du titre.

* C’est un reproche que j’adresserais à la collection dans son ensemble plutôt qu’à cet ouvrage seul : à force d’isoler une citation accrocheuse et percutante, les éditeurs dénaturent le texte même en le faisant passer pour ce qu’il n’est pas.


[METTERNICH Princesse de, « Je ne suis pas jolie, je suis pire ». Souvenirs 1859-1871, éd. de Georges Poisson, Paris, Livre de poche, coll. La lettre et la plume, 2010.]

***
Dans la même collection : 

21 commentaires:

  1. C'est vrai qu'il y a des gens laids qui ont beaucoup de succès ! Talleyrand, boiteux, gras, vieux, séduisait de jeunes femmes.
    Maintenant, je vais aller chercher le portrait de cette dame...

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  2. Mais elle était belle ! J'ai vu un portrait dans sa robe blanche où elle ressemble à Sissi.

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    1. D'après l'introduction de l'éditeur, certains peintres ont réussi à la représenter à son avantage : je la trouve belle aussi, même sur la couverture, et ne comprends pas en quoi elle était considérée comme laide (changement des critères de beauté sans doute)

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  3. Je pense également que cette collection est + accrocheuse qu’intéressante, j'ai acheté et lu ce titre, "je meurs d'amour.." (que j'ai préféré mais sans +)et également le condensé des mémoires de Saint-Simon et c'est mal ennuyeux :s
    J'avoue que je m'attendais à autre chose. Et j'en suis quelque peu dépitée. Mais j'ai lu d'autres autobio et c'est rarement supra-fascinant...

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    1. Ah zut pour Saint-Simon, c'est le prochain que je compte lire :/ J'avais espéré justement qu'il serait plus intéressant que ces Mémoires-ci.
      Je m'attendais aussi à des textes plus intéressants de la part de cette collection (mais je n'ai pas encore tout lu, il me reste notamment les récits de voyage, avec lesquels j'espère avoir plus de chance) : à force de chercher le peu connu, ils semblent avoir oublié l'agrément (si ces textes étaient oubliés, ce n'était peut-être pas tout à fait à tort non plus) Seule la correspondance de Beaumarchais se distingue vraiment d'après moi.
      Pour les Mémoires, j'en ai déjà lus plusieurs qui m'ont semblé très intéressant : la politique et les évènements historiques y étaient davantage pris en compte, et cela a sans doute joué dans mon appréciation, ce qui ne fut pas le cas ici.
      Dommage pour nous donc, mais je m'obstinerai encore un peu avec cette collection, je garde espoir de trouver des textes plus intéressants et plaisants.

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    2. J'oubliais: merci pour ton commentaire et ton passage sur mon blog :)

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    3. Les récits de voyage me tentent aussi (celui de Flaubert me fait les yeux doux :) )
      La correspondance de Beaumarchais va direct dans ma liste A acheter. Cet homme me fascine (mais comme toujours il y a le personnage et puis l'homme réel et donc cette angoisse d'être déçue -angoisse carrément :D)
      J'ai découvert ton blog grâce à ton "action Critique odieuse". Rien que le nom m'a fait rire et donc voici une lectrice de + de ton blog :)
      Belle journée

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    4. Personnellement, c'est surtout celui aux Kerguelen qui me fait très envie.
      Je comprends ton angoisse. ;) Si tu vas lire ma critique, tu verras que j'y ai retrouvé le style galant et piquant du 18e siècle français, un vrai régal. C'est le texte le moins susceptible de te décevoir d'un point de vue stylistique, je pense.
      Je suis contente que ce petit concours et mon blog te plaisent : bienvenue ici.
      Belle soirée et à bientôt.

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  4. J'avais repéré il y a déjà un moment plusieurs titres de cette collection mais, ma PAL étant trop grosse, ils patientent toujours dans ma LAL. Je vais peut-être être un peu circonspecte, du coup.
    Pour ce qui est de Saint-Simon, j'ai lu le premier tome de ses Mémoires dans la Pléiade et je suis fan. Comme pour tous les auteurs, je pense que c'est affaire de goût et j'imagine que quelqu'un qui ne connaît pas bien le règne de Louis XIV, ses figures marquantes et ses usages, peut être aisément paumé et s'ennuyer, mais personnellement j'ai été sous le charme de son écriture mordante et je le trouve très drôle... sauf quand il développe ses problèmes de préséance au parlement mais j'imagine que ce n'est pas ce qui doit être retenu dans un volume d'extraits.

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    1. Puisque c'est affaire de goût, il est possible que cette collection te plaise beaucoup plus qu'à moi. ;) Il y a de bons titres, notamment celui de Beaumarchais que j'évoquais avec Sandrine.
      Je préciserai quels types d'extraits ont été choisis pour Saint-Simon en septembre. ;)

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  5. Je passe mon tour ! Entre ton avis peu encourageant et mon peu de goût pour l'Histoire et les chroniques mondaines, je pense que ce serait pur suicide que de chercher à lire ce bouquin.

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    1. Je te confirme que ce livre n'est absolument pas pour toi. ;) Rien que pour l'aspect "chronique mondaine", ça me semblait évident.

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  6. Je passe aussi malgré ton billet très précis. Davantage pour l'époque, qui ne me passionne guère (oups)etsi en plus, c'est ciblé chroniques mondaines...! je préfère lire ton billet !
    Merci pour ton passage sur la BD sur L'Iran...

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    1. Tu fais bien de passer dans ce cas. ;) J'adore écouter les ragots et je me suis pourtant lassée de ceux-là, ça devrait donner une idée de leur intérêt...
      Merci pour ton passage. :)

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    2. Je suis morte de rire en lisant tes propos sur les ragots :D

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    3. Tant mieux :D Il faut croire que je suis bien inspirée ces jours-ci ^^

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  7. Je reste attentive et le feuilletterai si je passe devant.. Je trouve ce choix de publication curieux mais j'imagine que toute la "matière" n'a pas la même valeur. Je suis tes prochaines lectures.

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    1. Ce choix de publication : pour ce texte-ci ou le projet de la collection dans l'ensemble ? Je ne comprends pas trop non plus le choix de publier ce texte, bien que certains aspects ont leur intérêt aussi : j'ai personnellement découvert l'ambiance de cette époque-là à la Cour de Napoléon III. J'aurais sans doute évité une aussi grande déception avec un titre moins provocateur.
      Merci pour ton passage et de me suivre. :)

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  8. Pour reprendre la discussion que nous avons entamée sur mon blog, je te conseille la collection "Histoire d'amour de l'histoire de France" de Guy Breton. J'ai lu napoléon et les femmes, et j'avais beaucoup aimé!
    J'ai lu ton avis sur « Je meurs d’amour pour toi… ». Au final, j'hésite à lire ce dernier titre...

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    1. Merci pour le conseil ! Rien que le nom de la collection me fait très envie :D
      Le but de mon article n'était pas de décourager les lecteurs possibles de ce titre, mais c'est vrai que je n'ai pas caché ma déception face à ce texte assez fade finalement... "Je meurs d'amour pour toi..." m'a davantage plu, mais il ne faut pas s'y attendre à des déclarations passionnées.

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