Maine, J. Courtney Sullivan

Dans la lignée de Plan de table de Maggie Shipstead, Maine se présente comme le portrait incisif d’une famille bourgeoise américaine, grâce à l’intervention d’un évènement inattendu qui vient perturber les petites habitudes hypocrites de chacun. Après qu’un partage des mois d’été a été décidé par quelques-uns unanimement afin d’éviter de se croiser de surcharger la résidence d’été de l’aïeule, un changement de planning de la bru trop gentille et la grossesse d’une des petites-filles entraîne l’arrivée inattendue de sa mère, qui avait fui sa famille depuis quelques années. La réunion de ces quatre femmes provoquera bien sûr quelques tempêtes, tant extérieures qu’intérieures, révélées par une narration alternativement centrée sur chacune d’elles et leurs ressentis. De cette façon, nulle n’est épargnée et n’apparaît uniforme : les points de vue de chacune sur elles-mêmes et sur les autres les façonnent en en donnant une image nuancée au lecteur, qui ne peut que s’attacher à chacune de ces personnalités si touchantes et insupportables à la fois. Tandis que j’avais déploré quelques longueurs dans Plan de table, il n’en a rien été dans ce roman-ci, l’alternance des points de vue soutenant davantage l’attention grâce aux variations ainsi permises. De plus, le choix de quatre femmes de génération ou de milieu différent a été judicieusement exploité par l’auteure, qui glisse au fil de la narration quelques faits marquant une évolution des mentalités, que ce soit vis-à-vis de la religion, de la place de la femme dans la famille et la société, ou de la maternité.

Ainsi que l’avait annoncé Philisine (que je remercie encore d’avoir fait voyager son exemplaire), il s’agit d’un roman familial psychologique parfait pour l’été et les lectures délassantes.

[J. Courtney Sullivan, Maine, trad. par Camille Lavacourt, Paris, éd. Rue fromentin, 2013 / 1^re publication : 2011]