Les mots de Maud, Jean Jauniaux



Goutte à goutte, le café emplit la première tasse de la journée. Premier geste du matin : se réchauffer les mains en serrant la tasse, la porter à hauteur de visage et en respirer l’arôme. Après toutes ces heures de la nuit qu’il passe ainsi à marcher, ce geste est le premier qui restitue Jean-Baptiste au genre humain. [p. 14]

Cela commence par un récit d’écrivain, celui de ses habitudes (celle du premier café et d’une progression alphabétique : un titre pour chaque lettre, par exemple), d’un retour à l’écriture manuscrite et à une volonté de vérité après avoir rédigé tant de « romansdegare ». Au fil de ces lignes qui s’écrivent, de cette nouvelle vie qui commence, s’égrènent aussi bien les petits secrets d’écriture (dont j’ai été avide) que les confidences sur la raison qui le pousse à cette activité. Se révèle peu à peu un homme meurtri par la mort d’une mère, par le silence d’un père surtout, passionné par les mots qui le suivent depuis son plus jeune âge et dont il a fait son métier en devenant écrivain public.

Cela se poursuit avec une rencontre, avec les mots de Maud, un titre qui s’approche si bien des « maux » et d’un autre mot terrible qui plane sur ces deux vies. En quête de conseils, cette femme fera appel à Jean-Baptiste, et s’ensuivra une correspondance de plus en plus intime, que le lecteur ne connaîtra pas, mais devinera grâce à l’écriture sensible et pudique de Jean Jauniaux. Bien entendu, les sentiments s’emmêleront :
Et puis, il y eut le surgissement du sentiment. Entre ces deux-là naissait un amour de papier, d’encre, de mots. Un irrémédiable attachement qu’ils dissimulaient derrière des phrases [...] [p. 82 ; la suite de ce passage est très belle, mais je ne peux me résoudre à la dévoiler]
Cela se termine finalement avec des lettres – un retour aux premiers écrits et à l’essentiel, en quelque sorte – qui m’ont émue aux larmes par leur douceur dissimulant une si grande souffrance et par la poésie qui se dégage indéniablement de l’ensemble de ce roman.

C’est, en conclusion, un magnifique roman, poétique et touchant à un sujet grave avec beaucoup de sensibilité.

[Jean Jauniaux, Les mots de Maud, Avin, éd. Luce Wilquin, 2008]


* Encore un immense merci, Argali *
* A la découverte des éditions Luce Wilquin *
* Littérature francophone d'ailleurs : Belgique *


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11 commentaires:

  1. merci encore pour cette découverte, et je me mets volontiers sur la liste des voyageurs de ce beau livre

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    1. J'aurai besoin de ton adresse mail. ;) Je te tiendrai au courant dès qu'il sera prêt à passer chez toi.

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  2. Un livre que je ne connaissais pas mais qui me tente bien... Et puis, tu en parles si bien ;-)
    PS: je ne sais pas si tu as vu ce que Luce Wilquin prépare pour la rentrée de septembre mais il y a quelques petites pépites...
    A bientôt

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    1. Merci ! :D J'ai bien reçu ton mail et suis ravie d'avoir su te donner envie de le découvrir.
      Pour la rentrée de septembre, je ne sais pas, mais pour celle d'août, j'ai acheté aujourd'hui Le sous-bois justement.
      A bientôt.

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  3. Je suis contente qu'il t'ait plu. La 4e m'avait séduite. Je suis intéressée par ce livre voyageur.

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    1. Si je ne l'avais pas déjà envoyé à Carnet de lecture et si Marilyne ne venait pas fin septembre, tu aurais été bien sûr prioritaire et je te l'aurais envoyé immédiatement. :/ Dès que je le retrouve, je te l'envoie, tu as fait un très bon choix. :)

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  4. Encore un titre tentant. Cet éditeur a l'air d'avoir de très jolies choses, c'est une belle idée de nous avoir encouragés à le découvrir.

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    1. J'attends toujours ton avis sur un de ses titres qui me tente énormément d'ailleurs. ;) Je suis très contente de mon choix de maison d'édition pour ce challenge, mes découvertes sont globalement bonnes, et celle-ci se classe parmi les plus belles.

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    2. Comme tu l'auras vu, je suis trèèèès active sur mes blogs en ce moment. Je me cantonne donc à des lectures qui ne nécessitent pas de billets pour ne pas encore allonger la liste des billets en retard... Mais je n'oublie pas notre LC!

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