En choisissant mon
projet estival, j’avais envie de m’éloigner de mes habitudes (linguistiques) de
lecture et de voyager en quelque sorte par la littérature. Le choix de L’empailleur de rêves pour ouvrir mon
« été à l’étranger » s’est révélé parfait et aussi dépaysant que je
pouvais l’espérer : je me suis laissé entraîner au Siam, à dos d’éléphant,
au gré des souvenirs d’un cornac.
L’éléphant leva la patte pour permettre au
cornac de grimper s’asseoir sur sa nuque. Tandis que l’homme s’installait,
l’énorme animal cessa un instant de battre mollement des oreilles. La femme sur
la plate-forme de la maison descendit les marches et, dressée sur la pointe des
pieds, tendit au cornac un long morceau d’étoffe à petits carreaux pliés en
carré et du riz empaqueté dans une feuille de bananier.
[p. 7]
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Le récit se déroule
ainsi au rythme lent du pas de l’éléphant lorsqu’il n’est pas pressé par la
gaffe ou l’éperon le poussant à accélérer la cadence. Tandis qu’il tire les
grumes et morceaux de bois le long de la rive, le cornac se laisse bercer par
ses souvenirs, depuis son enfance protégée par le majestueux animal à sa
situation présente, en passant par la vente de son compagnon à un entrepreneur
voisin, son travail de sculpteur, puis de taxidermiste, avant de devenir
cornac. Sa vie familiale, auprès de son épouse et de son jeune fils impétueux
est également évoquée lors de quelques scènes du quotidien. Le destin de ce
personnage illustre aussi bien une partie de la vie thaïlandaise que la pensée
bouddhiste, comme le fait remarquer le traducteur, Marcel Barang, dans sa
postface : sans jamais en utiliser les termes ou en faire énoncer les
principes par son personnage, Nikom Rayawa les fait comprendre par son récit et
les réflexions qui naissent de sa lecture, notamment grâce au motif de
l’éléphant, si présent. Celui-ci est aussi bien représenté par Plaïssoute,
l’animal du cornac, que par un éléphant de bois sculpté dont le héros ne cesse
de projeter la construction. C’est surtout ce dernier qui m’a personnellement
marquée et m’a fait penser à une allégorie transposable dans nos vies, bien
avant que ce ne soit énoncé de façon plus explicite à la fin du texte.
En conclusion, un
roman riche de sens sous une apparente simplicité stylistique très travaillée
(l’auteur l’affirme lui-même par le biais du traducteur dans la postface, et
cela se ressent dans le texte : chaque phrase semble soigneusement
réfléchie de façon à en ôter tout superflu).
[Nikom Rayawa, L’empailleur de rêves, trad. par Marcel
Barang, La Tour d’Aigues, éd. de l’Aube, 2007.]
* Défi 100 pages *
On dirait que tu l'as plus apprécié que moi : j'en suis ravie :)
RépondreSupprimerJ'avais beaucoup aimé la postface.
J'avais envie de dépaysement et ai eu ce que j'attendais. :) Merci encore pour cette jolie découverte ! La postface m'a beaucoup plu également : j'ai peu lu des notes de traducteur (forcément, avec la littérature française en français...) et me suis rendu compte de tout ce qu'on pouvait en tirer.
SupprimerTrès beau titre et belle couverture :) Cela pourrait me plaire ! A voir ... ;)
RépondreSupprimerBisous ma Minou ;)
J'aime beaucoup la couverture aussi et me doutais que le titre te plairait. Je crois que le récit pourrait te plaire, en effet... J'ai un peu de mal à en être sure.
SupprimerBisous Laure :)