Dante écrivain ou l'Intelletto d'amore, Jacqueline Risset


Pour étudier l’œuvre de Dante et son parcours en tant qu’écrivain, Jacqueline Risset a construit son essai sur deux nombres fortement symboliques pour lui : le trois et le neuf (la trinité et le chiffre de Béatrice, la femme aimée). En effet, l’ouvrage est divisé en trois parties, Enigme, Trajectoire et Nœuds, elles-mêmes divisées en trois sous-parties dans le cas des deux dernières. La première constitue une introduction et pose l’énigme que ressent le lecteur face aux œuvres de Dante. Ensuite, Trajectoire est le chapitre le plus dense de l’ouvrage, avec sa sous-division en trois, celles-ci étant encore une fois fragmentées en trois et enfin en neuf pour ces dernières divisions. Jacqueline Risset y étudie l’ensemble de la production littéraire de Dante, du commencement avec la Vita Nuova à la fin avec Il paradiso (troisième partie de la Commedia), en passant par l’entre-deux : les Rimes, De vulgari Eloquentia, le Banquet, De Monarchia, l’Inferno et il Purgatorio. Chacun de ces textes est présenté, commenté et interprété par l’essayiste de façon la plus accessible possible : les descriptions d’évènements ou d’extraits peuvent donc poser problème pour les personnes qui n’ont pas encore lu Dante et souhaitent garder un effet de « surprise », mais permettent aussi au plus grand nombre de lecteurs de comprendre le propos. Les interprétations proposées ont éclairé, pour ma part, rétrospectivement ma lecture et m’ont permis de mieux comprendre l’Enfer et le projet de son auteur. Enfin, la dernière partie, Nœuds, revient sur la vie du poète et l’absence de la femme aimée, Béatrice, qui fut le moteur de toute l’œuvre de cet « intelletto d’amore » (intellectuel de l’amour).

On pourrait penser que cette structure formelle basée sur les chiffres très stricte a aidé à celle du propos, mais ce n’est malheureusement pas le cas selon moi : j’ai au contraire eu davantage le sentiment d’une fragmentation des idées. Jacqueline Risset semble en développer une dans chaque partie à partir d’un extrait particulier, mais sans créer de véritables liens et de cohérence textuelle. C’est assez dommage, car cela éparpille l’attention du lecteur et peut le détourner de cet essai pourtant fort intéressant.


[RISSET Jacqueline, Dante écrivain ou L’Intelletto d’amore, Paris, Seuil, coll. Fiction & Cie, 1982.]

25 commentaires:

  1. Cela peut être un essai tout à fait intéressant en effet... Bon par contre ton avis semble mitigé quand même alors je verrai même bien plus tard :)
    (Je ne suis pas très présente, mon mari est en vacances et nous avons profité du magnifique temps pour faire des balades avec les enfants, mais je ne t'oublie pas ;) )
    bisous Minou :)

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    1. Je ne pense pas que ce soit une lecture indispensable, à moins que tu n'aies envie de lire Dante : c'est très éclairant sur son œuvre et peut aider à la compréhension, au-delà du sens littéral, même si la forme ne m'a pas convaincue.
      (Tant mieux, profites-en bien ! Ici, la pluie est déjà de retour, mais hier, c'était un vrai bonheur de profiter d'un peu de chaleur. A bientôt)
      Bisous.

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  2. Dommage que ton ressenti soit relativement mitigé. J'aurais été assez tentée sinon.

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    1. Il reste assez intéressant, malgré mes bémols sur la forme. ;)

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  3. Je suis justement en train de lire La divine comédie de Dante et voilà que je tombe sur ton article ! Je pense que ce livre pourra m'aider à mieux comprendre l'oeuvre de Dante qui n'est pas très facile d'accès même avec les notes qui éclairent heureusement un peu la lecture ( j'ai justement l'édition traduite et notée par Jacqueline Risset, ça fera donc un excellent complément). Je te remercie donc pour ce billet :)

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    1. Ca tombe juste bien ! J'avais justement dû faire cette lecture en complément d'une étude de certains chants de l'Enfer, et ça m'avait bien aidé. L’œuvre de Dante n'est pas facile, et les lectures théoriques sont vraiment indispensables, même si assez fastidieuse parfois (je l'ai lu en italien dans une édition où les commentaires prenaient plus de place que le texte même).

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  4. Avant de lire ton commentaire final, je me disais que cette façon de tenir à diviser l’ouvrage en fonction des nombres-clefs devait être un peu artificielle ; vouloir agencer ses idées dans un cadre strict n’est pas un problème en soi mais encore faut-il que cela fasse sens, ce qui ne semble pas être le cas ici.
    Penses-tu qu’après avoir lu "La divine comédie", je puisse lire ce livre, mais uniquement les parties traitant de "la Commedia" ou alors tout est trop lié dans cette partie pour que l’on puisse en extraire un morceau ?
    En tout cas, ça me motive bien pour attaquer Dante cet été (cela t’irait-il, écrit celle qui ne sait pas si elle pourra finalement le lire cet été ou à un autre moment ?)

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    1. Tu as bien repéré le problème d'une telle contrainte. ;) Je crois que ce n'est pas uniquement lié à ça, ça manque surtout de cohérence globale. Pour cette raison, je pense que tu pourrais te permettre de lire la partie sur la Commedia de façon isolée sans souci. Dans mon souvenir (cet article est ma réserve, donc je te laisse imaginer le temps écoulé depuis ma lecture), les analyses étaient compréhensibles sans se référer aux précédentes.
      A priori, cet été me semble parfait (ça correspond à mon projet estival, et s'il y a une saison où je suis plus motivée pour les projets, c'est bien celle-là), même si je ne sais pas du tout non plus ce que je ferai à ce moment-là.

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    2. *reviens d'hibernation*

      Merci pour ta/tes réponse(s). On en reparlera pour se caler le Dante.

      * repars dans son capharnaüm *

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    3. J'ai voulu te copier ma réponse par mail... Puis je ne t'ai pas écrit. :/ Le temps que je sorte de mon propre capharnaüm, ça nous laisse du temps. ;)

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  5. Je ne sais pas si cela me tente, non je ne crois pas :)

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    1. Je comprends, il faut quand même s'intéresser à l'oeuvre de l'auteur. Je l'avais lu dans le cadre d'un cours. ;)

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  6. Afin de te connaitre un peu plus, je te tags. J'espère que tu accepteras de répondre à mes questions. ;-)
    http://argali.eklablog.fr/tag-de-mai-liebster-award-a86568807

    A bientôt

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    1. C'est gentil d'avoir pensé à moi :) Je vais aller lire ce que tu me réserves et te répondrai avec plaisir dès que possible.

      A bientôt.

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  7. J'ai envie de livres où tu es à 100% d'accord : oui, je deviens très exigeante !

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    1. Ca, c'est de l'exigence en effet ! Tu seras servie selon ce désir pour mon prochain article : j'ai rencontré mon nouveau grand amour littéraire, auquel je n'ai rien à reprocher.

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  8. Pas fan des livre essai amis bon ça pourrait être pas mal pour lire La Divine Comédie car perso j'ai laissé tombé au bout de quelques chapitres : je sentais bien qu'il y avait plein de symbolique cachée que je pouvais pas comprendre sans analyse. Ca m'a dérangé car je sentais que je passais à coté de l'essence du livre et j'ai abandonné au 5ème ou 6ème cercle de l'enfer je crois...

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    1. Je me souvenais que tu l'avais commencé, puis n'avais plus trop fait attention à ton avancée. Je comprends ton abandon, c'est assez frustrant d'avoir l'impression de passer à côté d'une partie du sens. Je crois qu'il faut au moins commencer par lire les notes de bas de page en parallèle du texte, ça donne déjà plusieurs pistes (même si ce n'est pas toujours pratique pour garder le fil du texte même)

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    2. En fait pour les notes, ce n'était pas en bas de la page dans mon édition, il fallait carrément aller à la fin du livre ! Encore plus chiant à lire et encore plus facile de perdre le fil. Et puis perso, déjà qu'il fallait que je me concentre pour comprendre les vers, ensuite que je trouve la page de la note correspondante; que je la lise, que je la comprenne et après encore revenir à la page de l’histoire et suivre le court de l’histoire...euh impossible quoi ! Enfin pour moi en tout cas. Je n'ai pas eu la patience. Un jour peut-être, je me ferai violence... mais pas tout de suite :)

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    3. Ah mais je comprends parfaitement, ça me décourage très vite aussi. ;) Et encore, dans l'édition française, les notes ne sont pas si longues... J'ai une édition italienne de l'Enfer, il y a trois vers par page (dans les meilleurs cas), puis le reste est composé de notes de bas de page. Ca te donne une idée... Tu ne perds pas la page, mais le fil du récit, certainement !

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  9. Dante, voilà bien une oeuvre qui me fait un peu peur, je ne sais pas si je m'y risquerai un jour...

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    1. Je crois que sans mon cours d'italien sur cet auteur, je n'aurais pas commencé l'Enfer l'an dernier, et que sans Flo, la suite attendrait bien encore quelques années. Il y a des auteurs qu'on place si haut sur leur piédestal que ça décourage d'y monter...

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  10. D'après ce que je comprends, une lecture à réserver après avoir lu l’œuvre et non pas en introduction.

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    1. C'est personnellement ce que je ferais. J'ai tendance à préférer lire des analyses d'une œuvre en tant que conclusion plutôt qu'introduction, donc ça a sans doute influencé mon impression de ce point de vue.

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  11. ça pourrait être intéressant mais ce que tu en dis ne m'attire pas du tout (d'autant plus que je ne connais pas du tout l'oeuvre de Dante!)

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