Un voyage érotique. Invitations à l'amour dans la littérature du monde entier



Après la rencontre, la déclaration, le baiser et la mort, l’érotisme était l’un des passages obligés et pourtant encore manquant des anthologies amoureuses de Folio 2€. Le petit volume Le voyage amoureux a dû rencontrer un certain succès, puisque la formule est à nouveau renouvelée ici avec cette « invitation à l’amour dans la littérature du monde entier » : le lecteur passe de l’Antiquité latine à la Renaissance italienne et au libertinage français, à l’érotologie arabe, puis asiatique, avant de revenir dans nos contrées, en Angleterre. Le choix des textes semble refléter une volonté de faire découvrir quelques œuvres moins connues, puisque les sections latines, arabes et asiatiques surtout sont les plus remplies ; l’Italie, la France et l’Angleterre ne forment qu’une étape de quatre textes contre douze pour les autres. Bien que j’aurais apprécié une plus grande présence française (pourquoi pas un extrait de roman libertin plutôt que des Mémoires de Casanova par exemple ?), j’ai été plus ou moins agréablement surprises par ces témoignages d’autres cultures.

La section latine, invitant au plaisir d’après son sous-titre, est assez représentative des divers textes présents dans l’ensemble de l’anthologie : Catulle ouvre le voyage avec de beaux baisers poétiques, suivi par l’humour de Properce, tandis qu’Ovide et son incontournable Art d’aimer donne divers conseils. Lucrèce, quant à lui, apporte un peu de science au milieu de tout cet amour. Enfin, Pétrone introduit le motif du voyage et des péripéties aventureuses, qu’on retrouve chez Casanova. Si les Elégies de Properce ne m’ont guère amusée, l’une des aventures du Decameron de Boccace y a réussi : je connaissais déjà le récit et son dénouement, mais j’ai eu plaisir à le relire. En revanche, j’ai été beaucoup moins sensible à l’érotologie arabe et à la sacralisation asiatique du sexe. Les textes plus prescriptifs m’ont rapidement ennuyée, tandis que la plupart des autres m’ont déroutée par leurs métaphores plus ou moins imagées. Le retour en Europe fut donc le bienvenu pour terminer ce voyage sur une note transgressive avec L’amant de lady Chatterley et, surtout, un texte de Wilde dont j’ignorais l’existence, Teleny. Ce dernier fut ma plus belle découverte dans cette anthologie : Wilde décrit superbement (et très explicitement ; âmes prudes s’abstenir, autrement dit) les amours homosexuelles de Teleny et du narrateur. En voici un passage :

Un baiser, c’est quelque chose de plus que le premier contact charnel de deux corps : c’est l’exhalation de deux âmes enamourées. Mais le baiser criminel longtemps retenu, longtemps désiré, est plus sensuel encore ; c’est le fruit défendu, c’est un tison ardent qui enflamme le sang. [p. 85]

 
[Un voyage érotique. Invitations à l’amour dans la littérature du monde entier, Paris, Gallimard, coll. Folio, 2012.]

4 commentaires:

  1. Je découvre tes billets et cette partie de la collection 2€. A piocher!

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    1. Exactement ! Ma collection est maintenant presque complète (dans ma bibliothèque en tout cas, pas encore sur le blog : à côté des anthologies amoureuses, il y a aussi les parents, les sorcières, les anges, l'amitié, le bonheur, la lecture ou Noël) Bonne découverte/pioche ;)

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  2. Oscar écrit superbement ! Il est suave. Je note rien que pour lui (pour la curiosité des autres aussi...)

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    1. Je connais déjà Oscar par d'autres de ses œuvres et lui fait tout à fait confiance pour l'écriture superbe. ;) Rien que l'extrait de Teleny vaut les 2€ de ce petit livre !

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