A priori, Jostein Gaarder n’est pas un auteur dont l’œuvre
me tente : je n’en connaissais que Le
Monde de Sophie que je n’ai jamais eu à lire, ni l’envie de le faire.
Malgré tout, lorsque Tête de Litote a lancé son challenge pour faire découvrir
son auteur préféré, j’ai décidé de passer outre mes préjugés et de lire au
moins un de ses textes. Connaissant mes goûts, c’est Vita Brevis que Tête de Litote m’a conseillé, avec succès :
sans être un coup de cœur, ce fut une lecture agréable et intéressante.
Ce roman s’ouvre sur une mise en scène de l’auteur par le
procédé du « manuscrit trouvé » : il s’agirait cette fois d’une
longue lettre de Floria Æmilia à saint Augustin, son concubin pendant de
nombreuses années avant qu’elle ne soit abandonnée pour la Philosophie et la Chasteté.
Écrite après la lecture des Confessions,
cette lettre s’affirme comme une réponse à ces souvenirs si sélectifs : Floria
rappelle à son ancien amant leur bonheur passé, ainsi que certaines scènes
qu’il a occultées de ses mémoires ou déformées.
Au-delà de ce premier aspect, Jostein Gaarder propose
également par la voix de cette femme une réponse aux idées philosophiques de saint
Augustin : il met en évidence certaines contradictions (pour un homme qui
prône la chasteté, il semble bien obnubilé par le « péché charnel »
et la « concupiscence », entre autres) pour mieux réfuter certains
préceptes. J’ai notamment été marquée par l’idée du refus de tout plaisir par
ce penseur chrétien. Or, comme le rappelle la narratrice, la nature et ses
beautés sont aussi des créations de Dieu ; en les refusant, c’est aussi
Dieu qu’on rejette d’une certaine façon. Cette lettre, bien qu’adressée à toute
la chrétienté, au-delà de saint Augustin, n’empêchera pas les craintes de
Floria quant à l’avenir des femmes dans des sociétés où elles sont perçues
comme de dangereuses tentatrices de se concrétiser par la suite, comme nous le
savons par notre connaissance de l’Histoire.
Dans l’ensemble, j’ai donc apprécié cette lecture et cette
voix féminine créée par Jostein Gaarder, en réponse à une montée du machisme
parmi d’autres et à un ascétisme exagéré.
[Jostein Gaarder, Vita
brevis, trad. du norvégien par Hélène Hervieu et Martine Laffon, Paris, Seuil,
coll. Points, 2003.]
Du même auteur :
Au premier abord, je ne suis pas attirée du tout par ce genre de livres. Mais après tout, il faut savoir varier. Donc peut être que je me laisserais tenter un de ces jours ! :)
RépondreSupprimerJ'espère qu'il te plaira si tu te laisses tenter. :) Je ne regrette pas de l'avoir fait en tout cas.
SupprimerLes challenges et lectures communes permettent surtout de découvrir des auteurs qu'on n'a pas l'habitude de lire en d'autres temps! J'adore ce genre d'initiative!
RépondreSupprimerEn tout cas, je ne regrette pas du tout d'avoir tenté et d'avoir suivi Tête de Litote. J'apprécie aussi ces initiatives et ces découvertes !
SupprimerEvidemment, je suis plus que ravie par cette chronique ;) Je suis contente de t'avoir fait découvrir et surtout aimer cet auteur ! J'espère que tes futures lectures seront aussi concluantes ;)
RépondreSupprimerJe l'espère aussi ! Encore merci pour cette découverte. :)
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