Le sommeil délivré, Andrée Chedid


Présentation de l’éditeur :

« Un jour, j’avais vu un poisson se débattre. Il avait fait un trou dans le filet et s’était échappé en laissant beaucoup d’écailles. Mon frère l’avait injurié. (…) Près de lui, je tenais mes bras croisés, mes mains serrées sous mes aisselles, pour ne pas applaudir. »
Tout comme le poisson, Samya aussi aurait voulu s’échapper. Échapper à sa condition de femme, à son mariage arrangé par son père, à son existence d’épouse, dans un petit village au bord du Nil, [...]
Mais est-il possible de se rebeller, quand on n’a connu que la soumission, sans participer à sa propre destruction ?
Andrée Chedid détaille avec délicatesse et subtilité le destin tragique d’une femme condamnée au malheur.


Mon avis :

Après une première lecture scolaire il y a quelques années, j’ai eu envie de donner une seconde chance à ce roman d’Andrée Chedid : j’en avais gardé un assez mauvais souvenir, mais j’ai pensé que le thème pourrait davantage m’intéresser aujourd’hui, dans le cadre de mon ABC au féminin.

Le récit s’ouvre en effet avec un point de vue centré sur une femme, Rachida : on suit pas à pas sa promenade vespérale et ses pensées, tandis qu’un drame se prépare à quelques mètres de là. Celui-ci est annoncé au lecteur, qui en ignore encore la teneur, mais sent monter une certaine tension. La narration se déplace ensuite sur Samya, dont le passé est retracé jusqu’à l’évènement tragique dont elle est responsable, afin d’expliquer son geste. Toute sa vie, elle a été enfermée dans les carcans sociaux, familiaux puis maritaux, soumise et malheureuse. Elle le supportait jusque-là, car ne sachant pas comment en sortir, mais lorsque le seul bonheur qu’elle ait connu lui est retiré, c’en est trop. Le dénouement extrême auquel elle parvient est très bien amené par l’auteure et apparaît comme la suite logique des évènements : il n’aurait pas pu ne pas advenir et n’aurait pu le faire avant. La narration est donc très bien maîtrisée par Andrée Chedid, dans une écriture poétique et très agréable, mais, malheureusement, je n’ai pas réussi à m’attacher à ces personnages ou être touchée. Tout au long du texte, je m’y suis senti extérieure, comme une spectatrice qui regarderait tout cela à travers une longue-vue. 


Un extrait représentatif de l’ambiance du roman :
Comme je ressemblais aux femmes de mon pays ! Les épaules ploient et la vie se déchiquette entre ses habitudes. Mais, tandis qu’elles se résignaient, moi, je n’acceptais pas ma vie. Ma vie humaine n’était pas que cela ! Je ne l’acceptais ni pour elles ni pour moi. Ni pour les pauvres ni pour les riches. Je refusais l’idée que l’argent puisse faire taire la solitude des femmes de mon pays. Qui les regardait jamais avec cet amour qui transforme ? Et que peut faire l’argent à l’amour ? Je n’acceptais pas, mais je ne savais que faire, ni vers quoi me tourner.
[CHEDID Andrée, Le sommeil délivré, Paris, J’ai lu, 1989, p. 160.]


***

2 commentaires:

  1. Je n'ai jamais lu Andrée Chedid, je ne connais que quelques poèmes, et encore... Si tu as essayé deux fois, c'est que ce livre n'est pas pour toi... Il y en aura d'autres !

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  2. je n'ai lu que des extraits de ses textes... j'aimerais en connaître un peu plus. Joli blog! ;-)

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