Le coeur cousu, Carole Martinez


Présentation de l’éditeur :

Dans un village du sud de l’Espagne, une lignée de femmes se transmet depuis la nuit des temps une boîte mystérieuse… Frasquita y découvre des fils et des aiguilles et s’initie à la couture. Elle sublime les chiffons, coud les êtres ensemble, reprise les hommes effilochés. Mais ce talent lui donne vite une réputation de magicienne, ou de sorcière. Jouée et perdue par son mari lors d’un combat de coqs, elle est condamnée à l’errance à travers une Andalousie que les révoltes paysannes mettent à feu et à sang. Elle traîne avec elle sa caravane d’enfants, eux aussi pourvus – ou accablés – de dons surnaturels.
Carole Martinez construit son roman en forme de conte : les scènes, cruelles ou cocasses, témoignent du bonheur d’imaginer. Le merveilleux ici n’est jamais forcé : il s’inscrit naturellement dans le cycle de la vie.


Mon avis :

J’attendais beaucoup de ce roman, notamment après avoir lu l’avis de Stéphanie (du blog Semer des mots…) qui en parle merveilleusement bien, mais j’étais très loin de m’attendre à un tel coup de cœur ! Ce livre fait partie de ceux qui font vibrer, trembler, pleurer, (sou)rire et écouter, tel un enfant émerveillé par un joli conte. Tout au long du récit, je me suis laissé porter par les mots de Soledad, la cadette destinée à la solitude dès sa naissance par son nom, et par ceux de la conteuse de la famille, celle qui fut mère trop tôt. J’ai tremblé pour les deux sœurs face à l’Ogre, ces deux enfants complémentaires, l’une fille du soleil et l’autre de la lune. J’ai pleuré sur le sort réservé à Angela et Pedro, les deux mal-aimés de la communauté peureuse face à l’inconnu. Je me suis laissé ensorceler par la magie de ce roman, tissé de main de maître par Carole Martinez, et par les gestes de Frasquita, la couturière virtuose.

Ce qui rend ce roman si chatoyant, ce sont tous les fils thématiques exploités et mis en valeur par l’auteure : aucun n’est sous-estimé ou n’éclipse les autres, chacun s’insère harmonieusement dans l’ensemble. Le conte se mêle avec justesse au roman, de même que le merveilleux au réalisme. La magie, très présente, apparaît comme naturelle et vraisemblable, liée aux croyances populaires. On pourrait la considérer dédaigneusement  comme un tissu de superstitions, mais il est si beau d’y croire et de revenir en enfance, au temps des histoires chuchotées le soir. Sur cette première trame, se superpose l’histoire d’une famille et d’une lignée de femmes, une transmission mystérieuse de bonheurs et de souffrances à travers une mystérieuse boîte. La maternité, la fratrie et les liens familiaux sont donc abondamment évoqués. Mais les hommes interviennent également dans ce récit, brisant les vocations et les destins d’un fil noir rageur, à l’image du rouge, symbole du sang et des guerres, ou de la couleur des peurs ancestrales face à l’inconnu. Enfin, le rapport entre l’écrit et l’oral, le roman et le conte, forme la bordure de cette œuvre : on n’y est pas forcément attentif, mais c’est un élément essentiel et structurant, dont la solidité assure le maintien de l’ensemble.  

Il y aurait encore tant à dire sur ce magnifique roman, mais je n’ai plus de mots à poser sur toutes mes émotions. Je ne peux que vous en conseiller vivement la lecture. 


LC avec Métaphore 

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Cet article est également publié sur le blog Passion Bouquins.

12 commentaires:

  1. Tu en parles magnifiquement bien, c'était un beau coup de coeur pour moi aussi. Mais... ce n'est pas le premier roman de Carole Martinez (contrairement à ce qu'on croit) : je l'avais proposé dans les idées de premier roman et Argali m'avait fait remarquer que Carole M. avait déjà publié en jeunesse. Ca ne diminue pas trop ton plaisir de lecture si je ne le compte pas ??

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  2. Décidément, ce livre a vraiment énormément de succès. Je vais finir par me trouver désespérément rigide si je continue de résister aux louanges qui pleuvent sur son compte depuis près de 4 ans...

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  3. Tu en parles bien aussi de ce beau livre.
    J'y replonge souvent en pensées avec un vrai bonheur. Je pense que je vais le relire très vite.
    C'est réellement une de mes plus fortes émotions littéraires.

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  4. il a rejoint ma PAL la semaine dernière, j'ai hâte de le lire

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  5. Je suis contente que tu aies aimé, ça a été un gros coup de coeur pour moi aussi.

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  6. Décidément depuis que j'attends parler de ce roman ... il faut que je le lise. En plus tu ne parles avec un tel enthousiasme, que je me dis que je passe vraiment à côté de quelque chose d'important!

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  7. Pour moi aussi ce fut un réel plaisir de partager avec toi cette lecture, c'est un vrai coup de cœur, mais toi aussi tu en parles merveilleusement bien!!
    Son deuxième roman est bien aussi, j'ai fait une chronique il y a quelques temps, mais j'ai préféré Le cœur cousu.
    A bientot

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  8. J'ai lu Du domaine des murmures et j'avais adoré le style de l'auteure, plein de poésie. Mais apparemment, celui ci à encore plus de succès ! Merci pour cette belle chronique qui donne envie. :)

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  9. J'ai lu ton premier paragraphe... et je n'en lis pas plus! En quelques lignes, tu as réussi à me convaincre! Je le note de suite! :)

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